J’ai
attendu pour publier cette critique que l’auteur du texte incriminé, Frédéric
Dufoing, me donne son accord et/ou me propose certaines modifications. Je lui ai donc fait parvenir ce texte.
A
ce jour il n’a pas répondu et, d’après une connaissance que nous avons en
commun, il ne le fera pas. Il a
probablement de très bonnes raisons. C’est dommage.
C’est
dommage parce que j’aurais bien voulu savoir ce qui fait croire à FD qu’il
suffit de montrer l’irrationalité d’un discours
idéologique pour le rendre inopérant et donc s’en débarrasser.
Ce
genre de conviction me semble du même ordre que celle de ces historiens
qui, en parlant du nazisme, croient, une
fois qu’ils lui ont collé l’étiquette de
«totalitarisme», avoir ainsi démontré
qu’une telle idéologie de peut pas à nouveau trouver preneur du fait «qu’on
sait à quoi mène» une telle idéologie
quant elle est adoptée, en tout ou parties, par un peuple et/ou par ses élites.
Une
boutade telle celle que l’on peut trouver ICI a
plus de sens que bien des arguments rationnels.
N’avons-nous pas avec quelqu’un comme Alain Soral quelqu’un qui, de
façon similaire à des agitateurs d’idées du passé surfant sur des frustrations bien réelles,
est à l’avant–garde d’un discours
idéologique qui a une prise réelle sur
certains esprits ?
===
D'avoir ICI dit le bien que je pensais de l’article de Frédéric Dufoing (FD
pour la suite) me permet donc maintenant d’en aborder
la critique.
J’ai bien conscience que cette «critique» peut elle-même être
l’objet d’une critique. C’est donc plus une invite à la discussion qu’une sorte
de critique ex-cathedra (telle qu’elle est pratiquée par 99% des
blogueurs) qui se voudrait «définitive».
Bien
que le découpage que FD a effectué me
semble inadéquat car trop complexe pour ce qui n’est, après tout qu’une
pensée «politique» assez insignifiante (insignifiante comme «pensée
politique» mais pas comme symptôme de l’insignifiance …) et simpliste , je suivrais son plan.
Introduction
Le
texte de Frédéric Dufoing n’est certes pas un «pamphlet» au sens d’un écrit
portant une certaine charge de violence qui, pour défendre une cause, se moque,
voire même calomnie une cause adverse, mais c’est tout de même un écrit
polémique dans le sens qu’il cherche, à partir de ce qui serait une sorte de
neutralité intellectuelle mal définie (FD indique «d’où il parle» mais garde néanmoins la croyance qu’il peut
se faire partie et juge malgré qu’il soit lui-même militant) à renvoyer les
discours de Soral à leur fausseté ainsi
qu’à leur nullité argumentative et donc, en quelque sorte à leur «impossibilité», à leur inanité, à
leur néant ; ce alors que le vrai problème n’est pas ici dans la vérité
des propos mais dans l’écho que ceux-ci ont.
1 Les règles élémentaires du
débat intellectuel
Après
avoir indiqué deux types de règles élémentaires du débat intellectuel dans les
domaines scientifiques et philosophiques, FD en ajoute un troisième qui,
écrit-il, relève des «exigences de
l'éthique et du fair play».
On
pourrait discuter de cette typologie dans la mesure où on peut s’interroger sur
le fait que ce troisième type pourrait tout aussi bien être incluse dans la seconde au chapitre de «des principes d'honnêteté». En effet si
on considère que «l’honnêteté» est forcément liée à une valeur externe relevant
de la Morale au sens général ou d’une éthique particulière, on peut très bien
penser que la règle numéro deux et la règle numéro trois n’ont aucune raison
d’être dissociées. Ainsi un scientifique ou un philosophe dont l’éthique ferait
qu’il ne recherche pas vraiment la vérité ou qu’il tente de la falsifier (Cela
s’est vu …) n’est – c’est le moins que l’on puisse en dire - pas «fairplay».
D’autre
part FD écrit qu’un discours qui ne «respecte
pas ces prescriptions élémentaires» n’est pas forcément «illégitime». Evidemment il faudrait, de
façon plus large, poser la question de la légitimité. Mais, même sans ce faire,
n’est-ce pas un peu contradictoire de poser qu’il faut respecter les règles
indiquées (pour qu’une discussion honnête s’installe) pour ensuite écrire qu’il peut être «légitime»
de ne pas le faire ? Position défendable
mais position qui doit alors être déclarée et assumée comme telle.
Mais
peut-être l’explication des raisons de ce que j’estime être un manque de clarté
vient de ce que FD ne définit ni ce qu’est, pour LUI, un «discours d’idées» (Où commence et où finit l’idéologique) ni ce que
LUI met sous le mot rhétorique. Il écrit
: «(…) le discours d'idées (…) est
seulement rhétorique (…) il a pour but unique de convaincre et pas d'établir la
vérité». Outre que pour «établir la vérité», il faut souvent s’efforcer
d’être convaincant, il n’y a aucune raison de s’imaginer qu’un discours
pourrait être réellement convainquant
s’il prend une autre direction que celle de la recherche de la vérité (Cela
dépend aussi de la personne que l’on cherche et/ou à qui l’on s’adresse)
On
pourrait également analyser cette question à la façon dont le fait Michel Meyer dans son petit ouvrage sur l’argumentation – livre dans lequel il s’intéresse aux ressemblances et
dissemblances entre argumentation, raisonnement et rhétorique. (Livre
déjà signalé ICI)
FD
ajoute ensuite - ce qui semble être établi avec certitude pour lui - que «l'épistémologie contemporaine l'a montré, la
vérité est toujours relative à un certain dispositif de croyances».
Bien
qu’il soit possible que FD n’ait pas voulu réellement défendre cette assertion
dans toutes ses conséquences, je m’inscris pour ma part en faux contre celle-ci
car je crois que ce genre d’assertion conduit tout droit au relativisme philosophique
et/ou au constructivisme ; positions ô combien discutables.
De
cette certitude FD déduit qu’il faut donc obligatoirement ( ?) dire «d’où l’on parle». Et je ne suis, là également, pas très
convaincu.
Je
ne le suis pas quand un certain marxisme orthodoxe (ou étroit) attache trop
d’importance à cette idée (de connaître l’endroit d’où l’on parle) car il croit
fermement que notre vue-du-monde dépend essentiellement de la place que l’on
occupe dans le monde social ; je ne le crois pas plus quand FD, lui, parle de «valeurs».
Si
les «valeurs» auxquelles chaque
partie se réfère peuvent - suivant le relativisme posé au départ - être
relatives, on ne voit pas bien – une fois dévoilées et constatées, pour
certaines, comme étant inconciliables - comment le «débat» pourrait véritablement
«avancer» et même exister.
Il
est ainsi quasi impossible à un rationaliste (au sens de quelqu’un qui accorde
une grande valeur à la Raison) de discuter bien longtemps avec quelqu’un qui
défend une philosophie irrationaliste.
Cette
remarque n’est pas anodine ici car je pense que dans le cas Soral, nous sommes
justement confronté à quelqu’un qui, tout en tentant de rationaliser son
discours, est «inspiré» par un fond irrationaliste (le ressentiment face à ce
que sa paranoïa désigne sous le nom de
«sionistes» parce qu’il n’ose pas (toujours) dire «juifs»).
Enfin
si cela peut être un choix défendable de dire «d’où l’on parle» - de fait, bien
souvent, «qui l’on est socialement» et «quel
est notre cursus» -, j’ai tendance à penser qu’il y a souvent là un recours à une
forme d’argument d’autorité. Ne peut-on
pas penser que les raisons qui poussent FD à avancer, sans forcément en avoir
conscience, cet argument (d’autorité),
viennent peut-être du fait qu’il est dans l’enseignement et qu’existe
chez lui, comme chez bon nombre de ses confrères, une forme d’anti-égalitarisme
inavouable qui lui fait croire qu’il existe une coupure facilement délimitable
entre ceux qui auraient (la seule véritable) autorité à parler et ceux qui en
auraient moins ou pas du tout.
II
Le règne de la mauvaise foi
L’essentiel
de cette deuxième partie consiste pour FD à fournir un exemple probant que l’abandon des règles
prescrites en 1 conduit à la mauvaise foi.
Ceci
est incontestable.
La
question que je me suis tout de même posée, en tant que lecteur, est celle-ci :
Tout comme le fait un «Saidchomsky» quand, sur le mode «p’tit prof», il corrige «l’élève» Zemmour à propos de certains faits
historiques, pourquoi FD prend-t-il comme exemple de sa démonstration un débat
entre le Président Sarkozy (et Monsieur
Copé) et Tariq Ramadan ? Pourquoi ne prend-t-il pas plutôt comme
exemple, comme je l’ai fait, le débat
entre Caroline Fourest et Tariq Ramadan ? Soit un débat entre deux intellectuels
fortement médiatisés et dont les positions sont clairement antagonistes (la
Laïque face au Croyant) ?
En
effet, une comparaison entre les procédés rhétoriques du premier (Sarkozy)
et ceux du second (Ramadan) n’a pas
grand sens dans la mesure où ils n’appartiennent pas au même «champ» (au sens
bourdieusien) linguistique quant bien
même ils occupent momentanément le même media.
Si le second ne respectait pas les règles
édictées plus haut, il risquerait de perdre auprès de ses pairs ce qui
constitue son autorité à parler. Autrement dit s’il transgressait ces règles, il pourrait
peut-être au final remporter l’adhésion du plus grand nombre des spectateurs, mais
il perdrait alors le respect de ceux
dont il est vital pour lui qu’il le garde.
Dans le cas de Sarkozy, c’est presque
l’inverse. Même s’il a bien compris ce que Tariq Ramadan disait et est
peut-être convaincu en son for
intérieur que son contradicteur a raison, il ne peut publiquement l’admettre.
Ce surtout s’il vise cette partie de l’électorat du Front National pour qui un
intellectuel musulman, aussi brillant soit-il, reste un musulman et donc
quelqu’un à présenter sous un mauvais jour.
J’ajoute
enfin que je ne partage pas le pessimisme qui semble sourdre à travers la
description que fait FD de l’opinion publique (Pour une bonne compréhension de ce que recouvre la notion «d’opinion publique», voir ICI)
FD
parle des téléspectateurs - ramenés ici
à une sorte «d’opinion publique» test - comme s’ils étaient une masse uniforme
toute prête à, comme une foule, se laisser convaincre non pas par le plus
honnête intellectuellement mais par celui qui serait le plus offensif dans son
discours (on y reviendra à propos de Soral). Or si les téléspectateurs sont «passifs»
devant leur écran, ils ne le sont pas forcément en leur for intérieur. A côté
du petit pourcentage de partisans inconditionnels de l’un ou l’autre des
personnages, il y a un public dont rien n’autorise à dire, sauf pétition de
principe et/ou dangereuse dérive antidémocratique, qu’il n’est pas sensible à
la Vérité d’un discours.
Au
passage et à propos des arguments qui, parce qu’ils seraient conformes aux
règles indiquées plus haut, feraient la victoire du «camp de l’intelligence» (dixit FD), je ne trouve pas que celui
qu’avance FD en faveur des deux
politiciens, soit très convaincant. En quoi le fait,
effectivement vrai, que dans le monde musulman, le pouvoir soit beaucoup plus
diffus que dans le monde catholique (mais cette différence n’étant certainement
pas aussi nette que FD semble vouloir le dire, surtout si on ne raisonne pas
uniquement en termes de «pouvoirs politiques») empêcherait de proposer un
moratoire ? En quoi serait-ce un
argument à charge contre Ramadan ? La question reste ouverte et non fermée
comme semble le croire FD.
III Pourquoi analyser les
discours de Soral ?
FD
nous annonce péremptoirement que les «procédures de mauvaise foi se sont
généralisées pour former un système qui occupe toute la sphère du débat public». (C’est moi qui souligne).
C’est
plutôt là un discours de militant ; un discours beaucoup plus subtil que celui
que tiennent les extrémistes de tous bords qui luttent, disent-ils contre le
«Système» mais un discours tout de même simplificateur qui, en dénonçant ainsi
tout ce qui se fait en matière de communication dans nos démocraties, donne de
l’eau aux moulins de ces mêmes extrémistes. Ce d’autant plus que s’y ajoute chez FD un
aspect décliniste (la mauvaise foi irait en augmentant …) ou décadentiste.
Ce
discours «militant» se confirme par le fait que FD semble vouloir dénier à Soral
le qualificatif de «dissident». Or, qui peut reprocher à quelqu’un de ne pas
être dissident (ou de ne pas l’être assez) si ce n’est celui qui se considère
comme tel et en tous cas plus qu’un Soral ?
Je
crois que FD à partir de là s’écarte de ce qu’il veut démontrer : La mauvaise
foi «foncière» de Soral ne ferait s’augmenter la mauvaise foi globale que FD
voit donc partout (sauf donc peut-être
chez lui-même ?). Or je ne suis, pour ma part, premièrement pas aussi
persuadé que semble l’être FD que Soral serait - comme tous ceux qui
participent aux débats publics, dixit FD - délibérément de «mauvaise foi» ni
par ailleurs que cette mauvaise foi serait un phénomène nouveau, endémique et en augmentation constante.
Que
Soral soit malhabile à articuler de façon cohérente ses convictions irrationalistes
et qu’elles semblent donc souvent contradictoires est une chose, dire qu’il en
est ainsi uniquement parce il ne respecte pas les règles habituelles qui
conviennent aux débats n’est, à mon avis, pas suffisant.
Mais
reprenons dans l’ordre le plan de FD
En
(1) donc FD dresse un portrait de lui-même ; études, convictions principales, parcours politique,
etc car il veut, que les lecteurs sachent «d’où il parle», et en relativiste
qu’il est, exposer ainsi au grand jour quelle est sa «grille de lecture».
A
ceci deux remarques. La première est qu’il ne devrait pas imputer à Soral ou à
d’autres certaines contradictions puisqu’il en a lui-même dans ses choix
politiques partisans. On ne peut pas, par exemple – pas seulement pour des raisons de cohérence
mais pour être pris au sérieux -, écrire «je
hais l’Etat» et dix lignes plus loin
dire que l’on voit la solution du
conflit israelo-palestinien par «la
construction d'un État unique, laïc, fédéral (…)».
Je ne
m’attarde pas sur la condescendance polie que le langage, du «bourgeois moyen» d’origine, trahit lorsqu’il
parle de ses élèves «armuriers, maçons, coiffeuses, jardiniers» - quand FD écrit qu’ils lui auraient beaucoup appris sur «l'autonomie,
la noblesse d'âme et l'esprit critique». Ce comme si, sorte de
«naturalisation» de l’être social, cette
différence d’origine sociale et/ou de milieu social impliquait obligatoirement
une éthique différente. Ce qui n’est pas
démontré (Ici FD, comme certains gauchistes l’ont souvent fait, semble
essentialiser le statut social - i.e.
faire une sorte «d’ouvriérisme»)
La
seconde de ces remarques concerne cette présentation.
Loin
de moi l’idée qu’il ne faudrait pas présenter ses titres universitaires dans certains
cas – surtout s’ils sont réellement mérités -mais je crois que dans le cas
présent, qui est tout de même une polémique (entre militants), cela ne donne
aucune valeur ajoutée à ce qui est dit et ce peut même devenir une sorte
d’argument d’autorité. Comparativement, comme je l’ai fait remarquer ici,il
faut une forme de courage à Alain Soral pour avouer qu’il n’est même pas
bachelier.
Sur
les orientations politiques de FD et sur les divers auteurs dont il dit qu’ils
sont beaucoup pour lui, il y aurait beaucoup à développer mais, bien que cela
aide à comprendre le reste, ce n’est pas le sujet ici
Sur
le point (2) (Pourquoi le personnage de Soral est intéressant et pourquoi il
est nécessaire de démonter ses logorrhées ?) FD est extrêmement prolifique. On sent qu’il est
un peu fasciné par le personnage (je
n’ai aucune gêne à parler ici de «fascination» puisque j’ai moi-même avoué, ici, l’être aussi). Il avoue d’ailleurs avoir
visionné toutes ses vidéos (Exploit
d’ordre masochiste ; auquel, personnellement, je ne suis pas arrivé).
La
première accusation de FD envers Soral est principalement son désir de paraître
- et les images de lui qu’il veut donner ; viril, cultivé, observateur lucide,
guide et gourou - et ce qu’il appelle sa «vulgarité».
Mais
FD ne s’arrête pas là. Il ne se contente pas de dire que la «psychologie» de
Soral lui déplaît, il n’hésite pas à parler, tout en avouant qu’il n’est pas
compétent, du DSM V,
soit de troubles mentaux !
FD dépasse là, les limites qu’il s’était lui-même
fixées. Vouloir «psychiatriser» un adversaire – ou quelqu’un avec qui on est en
conflit - n’est, de toutes façons, pas honorable. Sauf erreur dont j’attends
qu’il me fournisse aimablement la preuve, je crains d’ailleurs que de sa part, ou de celle d’un de ses amis politiques,
cela n’ait été une récidive …
Vient
ensuite, par une liaison trop alambiquée pour être sincère, l’accusation (portée
contre Soral) d’être «intéressé». Soral vend des livres et son site fonctionne.
J’avoue ne pas bien comprendre quel mal il y a à ça – sans compter qu’il faut prendre
en compte le libre choix de ceux qui achètent ou pas (Personne ne les y
oblige). FD perçoit, j’imagine, un salaire pour ses prestations éducatives (que
l’Etat lui verse si ce n’est des fonds privés). Il est donc libéré du souci du
lendemain pour ce qui est d’un revenu assuré régulièrement. Peut-il donc
comprendre que celles et ceux qui ne sont pas appointé(e)s par des fonds privés
ou publics puisse essayer de vivre de leur travail (ici «intellectuel») ?
J’écris
«alambiquée» car le reproche de vénalité que FD adresse à Soral vient se mêler
de façon pas très claire à ce qui semble être une accusation vers ce que FD
appelle une «ethnie» particulière. Bien évidemment je ne suis en train de dire
que FD reprendrait à son compte le stéréotype raciste et antisémite de Soral.
Ce que je trouve un peu choquant est l’utilisation de ce mot «d’ethnie» car il est encore trop souvent le pendant
euphémisé du mot «race».
FD posait une question ? Il aurait dû s’abstenir de
répondre, surtout à l’aide d’un tel mot (mot qu’il emploie hélas à nouveau plus loin).
FD
reproche ensuite à Soral la forme de son christianisme. Il l’oppose au sien –
«celui de l'Ève de Péguy ou des prières de Francis Jammes». Il faudrait qu’il nous explique si celui de
Ellul – auteur qui est une de ses références - a aussi son agrément car alors –
si le christianisme peut donc être vécu de nombreuses façons - FD devrait, en toute logique, admettre
que ce qui est admis pour l’un doit être admis pour l’autre.
Plus
juste me semble être sa critique de Soral quant à «l’utilisation du pardon
chrétien».
FD
en arrive au point 3 («quels buts je poursuis»). Ensuite détaillés ces buts se
résument à dire en quoi la «dangerosité» de Soral ne peut pas être négligée.
Sur ce point je lui donne entièrement raison.
J’avais d’ailleurs écrit à une
certaine époque quelque chose de semblable à l’un des proches de FD (au point
de provoquer une fâcherie …) sans en avoir d’écho. Je me réjouis donc qu’il en
soit maintenant ainsi. Il est en effet toujours réjouissant de voir que
certains adversaires d’hier se rangent à
votre opinion. Même si
c’est tardif …
Sur
la mauvaise «influence» qu’ont les «galimatias idéologiques» de l’agitateur
d’idées, j’ai déjà dit, sur ce blog, ce que j’en pense. Je ne vois pas, par
contre, la sorte «d’excuse» - FD semble
la présenter un peu comme telle - à être perméable à ces derniers dans le fait
que ces jeunes seraient «légitimement écœurés par l'air du temps» (i.e. toutes les
formes d’attaques politiques et médiatiques contre l’Islam ou, plus stupide contre les
populations d’origine arabe).
L’islamophobie ne peut en aucun cas être une
excuse à la judéophobie.
Je
ne crois pas non plus que les excès d’un «imbécile respectueux» à tendances paranoïaques puissent disculper
d’autres d’erreurs de compréhension sur la question israelo-palestienne. La
fausseté d’un discours extrémiste ne dédouane pas de sa fausseté un discours
plus modéré.
Sur
la stupide accusation d’antisémitisme dont FD a été l’objet, on peut tout de
même lui faire remarquer que certains militants de «l’anti-sionisme» devraient
mieux balayer devant chez eux s’ils ne veulent pas prêter le flanc à de telles
accusations.
Mais
j’en arrive à un autre point qui me paraît troublant. FD écrit que les propos
de Soral amènent une «terrible confusion dans le débat politique et moral aussi
bien concernant la politique internationale que des questions de politique
interne ou de méta-politique» (On sent
avec ce dernier mot l’influence de la ND
sur FD). Mais de quel «débat» parle-t-il exactement, est-on en droit de se
demander.
La
réponse est dans son texte. Soral, d’après FD, «affirme certaines choses qui
(lui) semblent justes et avérées». Pourquoi FD ne nous dit-il pas de façon plus
précise ce qui lui semble «juste et avéré»
dans ce que dit Soral ? Les
lecteurs de FD doivent-ils le deviner (en prenant le risque s’ils le devinent que
FD réponde qu’il n’a pas dit ceci ou cela) ?
Et
plus fondamentalement pourquoi FD ne s’interroge-t-il pas sur cette concordance
d’idées entre Soral et lui qui, via une fraction d’un courant d’idées comme
celui de la nouvelle droite, a pourtant une certaine logique ?
Je
passe rapidement sur - ce qui
«énerve» FD - les «emprunts» que Soral fait à divers auteurs car je
pense que cela, le plus souvent, relève chez ce dernier, d’un simple
name-dropping (Je n’ai jamais entendu Soral faire une seule analyse ou présentation un peu développée d’un des auteurs qu’il cite).
Je ne crois pas, par ailleurs, que Soral «prétende»
réellement avoir «découvert» certains de ces auteurs (Bien que FD récuse
plus loin l’idée que certains puissent être plus propriétaire que d’autres de
certaines idées, c’est pourtant ce qu’induit sa remarque).
Soral est phraseur et un combattant. Il prend
ses «munitions» là où il croit les
trouver. Ce qui «gêne» FD, me semble-t-il, est surtout le fait que Soral
utilise des auteurs qui lui sont chers …
Je
ne peux pas passer, par contre, sur l’idée que Soral «devrait beaucoup» (même
si FD précise qu’il s’agit uniquement de l’analyse des medias) à Pierre
Bourdieu et à un de ses meilleurs connaisseurs, Alain Accardo. Bourdieu et Soral sont tout
simplement intellectuellement incompatibles. Il y a un abîme entre celui qui
fut un rénovateur de la sociologie et un petit essayiste qui se prétend «sociologue». Soral n’a d’ailleurs pas manqué (Voir ICI avant-dernier
paragraphe) de préciser qu’il se situait en opposition franche (*) à ce qu’il
appelle la «sociologie officielle»
(*)
On peut remarquer ici que le «pape de la nouvelle droite» (l’un des
inspirateurs du discours soralien) - lui si habile par ailleurs (en tous cas bien plus que Soral) à tenter de
récupérer de véritables intellectuels
pour les intégrer dans un discours cautionnant ses thèses - n’a jamais
pu, contrairement à ce qu’il a tenté de faire avec certains intellectuels dits
«de gauche», «récupérer» Bourdieu. Alain de Benoist, par les idées qu’il a –
notamment en ce qui concerne les formes de communautés qu'il pense souhaitables –
ne pouvait, de toutes façons ni
comprendre Bourdieu, ni, encore moins approuver les conceptions de Bourdieu sur
le vivre en commun et sur la sociologie.
Sur
la dangerosité de Soral FD ajoute enfin qu’elle viendrait que «toute
confrontation argumentée, toute problématisation et toute proposition de
solution y soit noyée dans un jeu de signes, de classements au sein duquel il
faut s'affilier (…)» (**). Ici ce qui ne devrait être que descriptif devient
chez FD négativement normatif. Soral est idéologiquement orienté. Il mène un
combat. Il n’est donc pas illégitime de sa part de jouer avec le système de
classements et de signe (il en joue même très bien). La dangerosité de Soral
n’est pas là, elle est dans le contenu du message ou, si l’on préfère, cette
dangerosité (dans la mesure où on estime qu’il est dangereux et donc proscrit
de le faire – ce que je ne crois pas) à jouer avec les systèmes de
classements n’est que seconde par
rapport à la première.
(**) FD dénonce au passage la
pauvreté des débats sur internet et je ne lui répondrais pas ici car c’est une
question plus générale et ce n’est pas l’objet de cette réponse. Espérons
simplement qu’avec moi, il relèvera le défi …
En
dernier lieu, et pour cette première
partie, FD attribue à Soral une «technicité
prodigieuse» du fait qu’il sait user et abuser habilement de la forme vidéo
pour diffuser ses idées. Il est certes, comme bien d’autres, beaucoup plus
habile que, par exemple un Jean Robin (qui n’a pas encore saisi aujourd’hui à
quel point le voir bafouiller en personne dessert ce qu’il veut dire …) mais je
ne vois pas en quoi il serait à mettre à
l’actif de Soral le fait que cette diffusion est, en nombre, importante. De
plus, il suffit de regarder les chiffres sur YT ou DM pour voir que nombreuses sont les vidéos ayant une audience bien plus importante que celle du petit guru.
Je n’emploierai donc pas, pour ma part, l’excessive formulation ci-dessus.
Certes Soral est un parfois un habile bretteur mais dès qu’il rencontre quelqu’un capable de luirépondre sur le même ton, il n’a pas forcément le dessus. Et
ne parlons pas de ses ridicules vaticinations autistes mensuelles qui semblent
n’exister que pour que son troupeau de suiveurs sache «ce qu’il faut penser»
(***) de l’actualité à travers le prisme du soralisme.
(***) Avec un peu d’habitude, il doit être facile de deviner de quelle
façon le petit guru va interpréter tel ou tel événement. Je me suis «amusé» à
le faire pour ce mois de janvier et c’est sans surprise que j’ai entendu ce
qu’il faut penser d’après le « professeur » Soral …
Sur le manque d’originalité de ce qui fait fond dans le discours de Soral,
je suis évidemment d’accord avec FD. Bien que, tout comme petit son frère ennemi débile l’inénarrable Jean Robin, il le
nie farouchement, c’est un discours
typiquement d’extrême-droite (Complotisme, désignation d’un bouc émissaire,
négation de la division politique au profit d’une entité particulière plus ou
moins mythifiée, etc, etc).
Suit alors une présentation, de ce que va faire FD dans la suite de son article, et une précision.
Sur le démontage des procédés rhétoriques de Soral que FD opère, je ferai
simplement deux remarques.
La première
est à propos de ce que FD dit du discours de Soral qui serait « délétère parce qu'il souille de
nobles combats et de belles révoltes (…)». J'ai pour m part du mal à admettre cette formulation du fait de ce qu'il implique (Le terme de souillure implique l’idée qu’il pourrait exister
des combats «purs». Ce qui est très discutable).
Soral serait donc un corrupteur
de combats nobles et de belles révoltes. Passons sur l’idéalisme que de tels
adjectifs révèlent chez celui qui les utilise. La question que l’on peut en
réalité se poser est de savoir : comment donc est-il possible que ces
combats et ces révoltes puissent être «souillés» ?
N’est-ce pas parce que
certains courants de gauche sont, de par les idéologèmes dont sont faits leurs
discours, perméables à un discours du type que celui que Soral
défend ? Même au risque que l’on
m’accuse de dire une banalité, ai-je le droit de rappeler que le fascisme et le
nazisme ont certaines de leurs racines idéologiques à gauche et qu’il n’est
donc pas très étonnant qu’aujourd’hui encore des transfuges existent ?
La seconde
(remarque) est sa déclaration selon laquelle son «objectif est … moins de
rétablir une vérité quelconque concernant les débats dont il se saisit et qu'il
exploite que de démolir la sophistique soralienne». J’aimerais qu’il m’explique
en quoi ces deux objectifs seraient séparables et/ou en quoi le premier ne
prime par sur le second. En effet, je ne vois pas comment on pourrait
«démolir la sophistique soralienne»
sans en même temps (justement !) détruire les idées qu’il défend
(Je pense ici en particulier, bien évidemment, à la saloperie morale qu’est sa
défense du négationnisme).
===
PS de la
première partie :
FD croit nécessaire de préciser qu’il ne porte pas de
jugements à priori sur le contenu des livres de Soral mais uniquement sur
certaines des vidéos qui l’ont fait connaître.
Cette précaution oratoire est
honorable mais je crois que, ce sur quoi elle repose - la distinction entre
oralité et écrits de Soral - est illusoire dans le cas de ce dernier.
Soral, quand il écrit, n’accède
pas à ce registre d’énonciation qui fait la différence entre, ce que l’on dit
parfois sans avoir réfléchi suffisamment auparavant, et ce que l’on est capable
d’écrire pour qu’il s’agisse d’une pensée véritablement originale ou même
simplement d’une pensée.
Soral n’est que le réceptacle d’idéologèmes
explicables en grande partie par son parcours. Ils lui sont consubstantiels et
le fait qu’ils les disent ou les écrivent n’en change pas la teneur.
S’il
fallait, pour s’assurer de la réalité de leur médiocrité lire tous ceux à qui
internet à fait croire qu’ils avaient une «pensée » originale et qui,
après s’être exprimés sur la Toile, s’imaginent écrivains (un bon exemple est
ce pauvre Jean Robin), nous serions obligés non seulement de passer des heures
à visionner des vidéos plus ou moins ineptes mais en plus à consacrer le temps
qu’il nous resterait à lire des livres insipides. Ce que je ne souhaite à
personne.
===
Je ne vois
rien, dans cette deuxième partie, que quelqu’un d’habitué à raisonner d’une façon
logique ne puisse approuver. On ne sait pas si Soral est délibérément un
falsificateur de la logique ou s’il n’a pas la possibilité de se rendre compte
par lui-même à quel point ses enchaînements sont boiteux mais le résultat est
effectivement qu’on a là un «gloubi-boulga
dialectique».
FD s’est amusé, probablement dans un but pédagogique, à détailler les
ingrédients et leur attribuer un nom. Muni de mon Perelman j’aurais pu
en faire autant mais, étant donnée l’évidente pauvreté de la « pensée» de
Soral, j’ai pensé que c’était prendre un
stradivarius pour interpréter une scie …
IV
L'argument ad hominem abusif : Soral et Tariq Ramadan
FD analyse en détail et démonte avec brio un des «arguments» qu’emploie
Soral pour délégitimer Tariq Ramadan («toute personne se plie à celui qui la paie, à celui
dont elle dépend») ; ce, en partie, en montrant que l’on peut retourner
cet «argument» contre lui (Ce qui, en toute logique, sape la critique de cet
argument car un argument ne peut être à la fois vrai et faux). Mais ce que FD
veut probablement dire est que ce «schéma» démonstratif-argumentatif de Soral est «débile» car réducteur.
Je suis
entièrement d’accord.
La question que je me pose est de savoir s’il était besoin de cette
longue démonstration pour démontrer l’inanité de ce que raconte Soral et son
hostilité à Tariq Ramadan alors qu’il y a une explication bien plus simple
On aura noté au passage une étrange affirmation de FD «la Grande-Bretagne est un État qui défend le
mondialisme». FD pourrait-il nous expliquer comment et pourquoi un Etat
«défendrait» une idée qui conduit à son propre anéantissement. On peut, en
effet, certainement reprocher beaucoup
de chose à «l’impérialisme britannique»
mais le qualifier de «mondialiste» me semble farfelu ou il faudrait que
FD nous explique plus clairement ce que le terme «mondialisme» signifie pour
lui.
Enfin je
récuse la vision d’une sorte de Bourdieu
«utilitariste» (Qui est celle, en partie, d’Alain Caillé) que FD semble défendre.
V La
généralisation abusive : Soral et Mélenchon
Dans cette partie FD aborde deux points forts différents. Le second
concerne, comme le titre de ce chapitre l’indique, la généralisation abusive.
Il va de soi que FD a raison.
Il est beaucoup moins convaincant
pour ce qui concerne le premier point. Ce qu’il dénomme «sophisme de la légitimité
par la ressemblance ou par la participation».
J’avais moi-même déjà dénoncé ceci sur
un mode ironique ici (Voir à partir de «une série de bons gros poncifs
idiots»). Mais je dois préciser ce que «cachait» mon ironie.
S’il semble à priori stupide de penser que pour comprendre un phénomène
ou une situation il faille obligatoirement l’avoir vécu soi-même, il est
absolument évident que de l’avoir vécu «dans sa chair et dans son sang » apporte un plus dans cette «connaissance». Ainsi les douleurs de
l’accouchement qui, si elles peuvent
être imaginées pas les hommes, ne sont – bel exemple - jamais vécues par
eux.
VI Une
optique sectaire : Soral et les anarchistes
Dans ce chapitre je suis dans l’expectative quant à ce que FD a voulu
démontrer. Si c’est que Soral n’est pas seulement un sale con particulièrement
débile d’être antisémite (*) en 2012 comme on pouvait l’être du temps de
Bakounine, nous sommes d’accord. Soral est un con de - comme son ex-ami Blanrue
(Compilateur d’un recueil de citations antisémites) - ne pas prendre en compte
l’historicité des concepts.
(*) on notera au passage que FD change, à propos de Soral, le mot
«d’antisémite» en «antijudaïque». Ce, alors que plus loin, il le qualifie bien
d’antisémite
Ceci dit je m’interroge tout de même sur le reproche que FD fait à Soral
concernant son manque de courage à «assumer» son antisémitisme. Sérieusement
qui se risquerait aujourd’hui – ne
serait-ce qu’à cause des Lois – à «assumer» publiquement son antisémitisme ? Bakounine est ici un pare-feu dialectique
pour Soral. C’est une technique rhétorique très grossière sur laquelle il est
inutile de s’attarder.
Quand on
visionne la vidéo indiquée, on se demande d’ailleurs si Soral est réellement
aussi dupe que FD semble le croire, de la faiblesse de cette petite technique.
Soral a peur que cette étiquette lui «colle à la peau» (il a également peur de
prendre des coups …). Il se défend … maladroitement. Il y a là juste la preuve
que Soral 1) a peur, 2) qu’il est, contrairement à ce que prétendent ses
défenseurs et parfois hélas ses critiques, un bien pauvre rhéteur
Pour ma part ce qui m’a vraiment choqué dans cette vidéo, ce sont surtout les graves accusations que Soral
porte contre Jann-Marc
Rouillan. Etant donné ce que ce dernier a vécu c’est
tout simplement crapuleux de la part de Soral. Il vaudrait mieux pour ce
dernier qu’il n’allât jamais en prison ; là où certains propos,
contrairement à ce qui se passe au dehors, peuvent vous valoir une sévère (et
réelle …) correction.
VII Collage
d'impressions et mort de la critique historique : Soral et le judaïsme
FD ouvre ce chapitre par l’idée que Soral «sacraliserait le texte et la parole» - nous allons y revenir – et que cette «sacralisation» ferait que, pour ce dernier, le texte serait « performatif». Il ajoute que c’est étonnant de la part d’un sociologue et le serait moins si cela venait d’un philosophe.
FD ouvre ce chapitre par l’idée que Soral «sacraliserait le texte et la parole» - nous allons y revenir – et que cette «sacralisation» ferait que, pour ce dernier, le texte serait « performatif». Il ajoute que c’est étonnant de la part d’un sociologue et le serait moins si cela venait d’un philosophe.
On ne se
lassera pas de le répéter. Soral n’est PAS un sociologue.
Quant à croire, comme
semble le faire FD, qu’un philosophe est quelqu’un dont le discours se veut
performatif, nous ne devons pas, là également, avoir la même définition du mot
«philosophe» ...
Cette fois
encore, et toujours (hélas) à l’exemple du petit «historien» SaidChomsky FD décortique les affabulations de Soral quant à la
connaissance que ce dernier aurait du judaïsme et/ou du sionisme.
Je n’en vois, pour ma part, pas l’intérêt.
N’importe qui ayant un minimum de connaissance sur
ces deux sujets ne peut que se désintéresser de ces propos de présentateur télé chômage. Soral
ne sait tout simplement pas de quoi il parle.
Au passage j’ai noté - Je ne sais pas si c’est un trait d’humour ou pas –
que FD utilise un mot que Soral utilise lui aussi mais sans en comprendre le
sens. FD écrit : «la lecture
soralienne est davantage inspirée par l'épistémologie du personnage principal
d'Orange mécanique que par celle d'un érudit et d'un homme de bon sens».
L’épistémologie désignant soit la philosophie qui soutient des sciences,
soit, plus généralement, le discours sur
les théories de la connaissance, je ne vois pas très bien quel rapport il y a
entre les salmigondis de Soral et de telles théories.
De même, en réalité, pour le terme de «sacralisation» qui me semble être
inadéquat pour ce qui concerne la démarche de Soral qui est une démarche
essentiellement «politique» dans son aspect le plus abject : l’exclusion
d’individus en fonction de leur (supposée) origine commune.
Ensuite FD aborde la question qui
intéresse si manifestement deux crétins d’extrême-droite (un Blanrue et
un Robin) – qui était antisémite avant 1945 ? – mais apparemment sans
voir, tout comme les susnommés, qu’avant toute discussion sur ce sujet, il
faudrait commencer par montrer que le mot antisémite ne peut pas être mis en
équivalence de sens suivant l’époque à laquelle il a été utilisé et en tous cas
pas de la même façon avant la Shoah et après.
FD, poursuivant son idée de dénoncer les sophismes de Soral, retient celui
de «l'argument du nombre» ;
argument qu’il qualifie – je ne comprends pas bien pourquoi - de «misérable». Or si, effectivement ce
n’est pas un argument quant à la vérité d’un fait, ce peut être tout de même en
être un - à moins de rejeter totalement le suffrage universel et donc emprunter
la dangereuse pente de l’antidémocratisme - dans un certain cas.
FD se montre plus convaincant quant aux (grossières) techniques langagières que
Soral emploie fréquemment. Sauf pour certains esprits frustres, il est clair que Soral tricote son discours en mélangeant de très vagues
connaissances livresques et des événements de l’actualité, récente ou pas,
qu’il a retenus. Croire qu’il y a là quelque chose de construit et de
solidement argumenté est une plaisanterie.
Ici aussi faire un démontage du discours soralien à partir de la
description de ce que seraient des procédés rhétoriques opérationnels me semble
superfétatoire. Soral est un bonimenteur. Il se fiche de la forme «académique»
de ce qui pourrait être des arguments pour sa cause.
VIII D'une analogie absurde à une causalité malhonnête : Soral et la guerre contre l'Iran
Dans ce chapitre, FD démonte de façon détaillée le discours sophistique que tient Soral dans son entretien de septembre 2012. J’écris bien «le discours sophistique» et non une sophistique car nous sommes ici en présence
d’un démontage de quelque chose de bien inférieur sur le plan intellectuel à ce
que serait le démontage d’une sophistique plus élaborée telle celle dénoncée àjuste titre par Bouveresse à propos de «l’Affaire Sokal».
Il faut l’avouer, c’est ici la partie la plus amusante de l’article de
FD ; meilleure parce que FD exagère. Il s’amuse à pousser jusqu’à
l’absurde les pseudo démonstrations du pseudo intellectuel qu’est ce brave garçon
A lire avec quelle facilité FD montre l’inanité et l’illogisme du discours
soralien, on en vient tout de même à se demander quelles raisons poussent FD à
le faire et à le faire de façon si poussée. Ne dit-on pas que qui veut trop
prouver ne prouve rien ?
En d’autres termes en lisant cette longue, très longue, trop longue
démonstration, j’en suis venu à me demander si, derrière ce jeu de démontage
systématique qu’il fait, FD, ne voulait pas, du fait du doute qui se serait
insinué sur certaines questions (rappelons ici que FD
trouve qu’il y a des choses «avérées et justes» chez Soral), se
persuader lui-même que la «vérité de Soral» n’avait absolument aucun
fondement ; bref s'il n'aurait pas fabriqué ici, à son tour, une sorte de pare-feu
dialectique...
Evidemment j’exagère à mon tour. FD ne croit pas au discours idiot de notre
petit gourou politique d’extrême-droite mais la question se pose tout de même de savoir à quoi, lui FD, croit sur le plan politique.
Ainsi seraient
peut-être plus claires d’une part les raisons qui font qu’il ait pu écrire
qu’il trouve que chez Soral certaines choses sont «avérées et justes» et,
d’autre part, s’il n’y a pas, lui, du fait de ses croyances et de son système
de valeurs – il faut se rappeler qu’il
défend le relativisme – une faille dans sa critique de Soral ; ce qui fait
que celle-ci n’a pas la puissance de persuasion que FD croit qu’elle a.
IX
Rupture déontologique et contradiction : Soral et les Pussy Riot
Là encore on ne peut que
féliciter FD pour, dans cet exemple, précis, son démontage des racontars
soraliens.
J’ajouterais, pour ma part deux
remarques.
Je l’avoue sans honte, ne
m’intéressant que très peu à l’actualité immédiate, je n’avais jamais entendu
parler des « Pussy Riot » avant de lire l’article de FD. La question que je me pose est donc celle-ci.
En quoi répondre en détail sur un tel point à Soral n’est-il pas une façon de
se focaliser sur micro-événement pour lequel n’importe quelle interprétation,
aussi bien celle proposée par Soral que celle de n’importe qui d’autre, répond
à un besoin d’explication.
En d’autres termes n’est-ce pas
une erreur de répondre sur le terrain de Soral – celui de l’interprétation des
faits – car – si on adopte une position relativiste, comme le fait FD par
ailleurs – il sera toujours possible de
prétendre qu’au minimum elles se valent toutes.
Alain Soral intègre un
micro-événement d’actualité à ses
délires paranoïaques, est-il vraiment besoin de s’y attarder ?
X Sur le fond...
FD résume de façon assez exacte ce qu’il appelle le «scénario politique» et «package
rhétorique» de Soral . Il voit là
en ceux-ci une résurgence de ce que l’historien Zeev Sternhell a étudié dans
plusieurs de ses ouvrages.
Ce en quoi je l’approuve.
Pour ce que FD écrit à la suite de cette juste dénonciation du «discours
fasciste» de Soral, je suis beaucoup plus circonspect tant ses
convictions militantes, à nouveau réaffirmées, semblent l’aveugler ;
l’aveugler au point d’être incohérent. Mais mon but dans ce billet n’est pas
discuter des idées de FD mais de faire prendre conscience à mes lecteurs en
quoi la critique que FD croit implacable ne l’est pas.
Conclusion
FD nous fournit une conclusion à laquelle on ne pouvait que
s’attendre étant donné ses référents culturels.
Je crois qu'il ne faut pas conclure.
Merci pour cet article très intéressant et, précisément, respecteux d'un vrai débat !!! J'accepte vos critiques (mais reste sur ma position constructiviste et relativiste !!!). Par contre, concernant l'argument du nombre, je ne me plaçais pas dans le registre politique (je suis un défenseur de la démocratie directe, donc, nécessairement, d'une majorité) mais épistémologique...
RépondreSupprimerPar ailleurs, je vous assure ne pas avoir reçu votre mail !!!
F. Dufoing
Bonjour et merci de votre aimable commentaire.
SupprimerSi vous désirez poursuivre, je vous répondrai plus en détails plus tard
Je n'ai ni implicitement ni explicitement parlé de "mail" pour la simple raison que ne connaissant absolument pas votre adresse-mail (La mienne est indiquée ci-dessus et ci-dessous ...) je ne vous ai pas envoyé de mail.
J'ai, en réalité, écrit que je vous avais fait "parvenir le texte" (par un ami commun). Ce qui n’est pas la même chose.
J’ose espérer que cet ami commun (Dont je tais ici même les initiales par discrétion) aura réellement cherché à vous contacter …
La discrétion n'est plus nécessaire aujourd'hui. Cet ami commun est Thibault Isabel ...
SupprimerDans la phrase qui commence par : « En réfléchissant à ce gloubi-boulga dialectique – preuve de la grande finesse sociologique de son auteur », le mot finesse est évidemment ironique, cher Mézigue (ou Tézigue) !
RépondreSupprimer@ Anonyme 10 février
SupprimerOui, vous avez parfaitement raison. Je me suis mal relu ... Désolé.
C'est corrigé.
(Et merci de m'avoir lu avec attention)